MusoNi : l’art du recyclage sonore

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Fuyant les tendances actuelles de la composition hip-hop, MusoNi fait partie de ces artistes anticonformistes qui préfèrent l’anomalie et l’imperfection à la standardisation et au polissage. En constante recherche sonore, celui qui se considère comme  « un gars de l’Est » apparaÎt comme un vent de fraÎcheur sur une scène musicale parfois en manque d’audace.

Un article de Olivier Boisvert-Magnen

Paru l’an dernier, le premier EP solo du Montréalais de 28 ans entre dans cette catégorie galvaudée, mais encore bien pertinente qu’est le hip-hop expérimental. Contenant des touches de funk américain et brésilien, NIGGAS IS ALLERGIC se définit et se démarque par son échantillonnage élémentaire, son esthétique désordonnée et, surtout, son approche minimaliste, menée de main de maître par un artiste en plein contrôle de ses capacités.

Élevé à Hochelaga, Saint-Michel et Rivière-des-Prairies, MusoNi a développé sa proposition musicale avec le même état d’esprit qui règne dans ces trois quartiers de l’est de la métropole : faire beaucoup avec peu. Au lieu de dépenser des sommes faramineuses pour se doter des plus récents synthétiseurs, logiciels ou samplers, l’artiste tire profit au maximum de ses modestes acquis.
« Peu importe ce que tu as, tu dois utiliser tous les outils à ta disposition. C’est un peu ça, la base du hip-hop », soutient-il. « Comme beaucoup d’enfants de première génération d’immigrants, mes parents n’avaient pas vraiment de vinyles, donc j’ai été davantage exposé aux cassettes durant mon enfance. Ces jours-ci, j’ai recommencé à les échantillonner. »

S’il compose depuis très longtemps sa musique à l’ordinateur, principalement à l’aide d’une version discontinuée d’Acoustica Mixcraft, l’artiste d’origine rwandaise a d’abord été initié aux tables tournantes par un ami d’adolescence, le beatmaker U-Clide. À l’époque, la mode était au gangsta rap formaté de 50 Cent, et le jeune MusoNi tentait de s’y plier en débitant ses premières rimes au micro. « La scène de R.D.P. (Rivière-des-Prairies) était très uniforme, et tous les styles des rappeurs se ressemblaient. On était des adolescents qui voulaient faire comme Dipset et tous ceux qu’on voyait à la télé. »

Au milieu de la décennie 2000, l’adolescent ouvre ses horizons au rap alternatif, sous-genre qui s’oppose au courant mainstream par sa diversité, son ouverture et son inventivité. « Je me rappelle que je regardais MuchMusic et que Kanye West y présentait ses coups de cœur de jeunesse. C’est là que j’ai découvert Pharcyde, Souls of Mischief… Après ça, j’ai entendu Madvillain, et ça m’a ouvert la porte à tout le reste », se souvient-il, un peu nostalgique, à propos de ce mythique projet collaboratif du légendaire producteur Madlib et de l’étrange rappeur masqué MF Doom, paru en 2004.

Du neuf avec du vieux
Revigoré par ces révélations sonores, MusoNi crée ses premières esquisses de beats en marge de ses études au cégep Marie-Victorin. La forme de ses  nombreuses explorations se précise avec les années. «C’est vraiment une approche par oreille, car je lis pas de notes. J’ai toutes les chansons dans ma tête et je sais d’avance ce que ça va donner. Mon trip, c’est de coller les échantillons que je trouve ici et là, que ce soit dans des banques de sons, sur des cassettes, des VHS… Je fais du nouveau avec du vieux.»

Crédit photo : Olivier Boisvert-Magen

En 2012, le compositeur quitte le nid familial et fréquente activement les soirées Art Beat, évènements hip-hop instrumentaux qui cimentent la scène montréalaise. Le Montréalais y fait ses premières apparitions sur scène et, par la bande, y rencontre bon nombre de futurs collègues et amis. « C’est là que j’ai appris c’était quoi, l’intégrité artistique. Quand j’ai quitté R.D.P.,  je pensais que le hip-hop à Montréal, c’était chacun pour soi. Au contraire, les Art Beat m’ont montré que je pouvais apporter quelque chose au son de la ville. Sans ça, je serais encore
dans mon coin. »

Travaillant sur différents projets qui devraient voir le jour dans les prochains mois, le compositeur se dit tout particulièrement stimulé par son quartier d’adoption, le Plateau-Mont-Royal. « J’ai jamais habité dans une place aussi bruyante », dit celui qui habite au coin Rachel et De Lorimier. « Honnêtement, ça correspond  vraiment à mes besoins, car je peux faire le bruit que je veux avec ma musique. C’est le genre d’intensité urbaine que je recherche. »

 

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